masse monétaire et croissance économique

La masse monétaire devrait-elle augmenter avec la croissance économique? On peut distinguer trois fonctionnements monétaires différents. Et il ne faut pas les mélanger. Le freebanking, le système monétaire à étalon-or, et le système monétaire de Banque Centrale sans étalon-or.

Dans le cas du freebanking, des banques concurrentes émettent chacune leur monnaie. Chaque monnaie est garantie par des biens cotés sur un marché organisé. Chaque banque est ainsi informée par les prix des biens et des écarts prévus entre les cours des divers biens. Une banque adapte sa création monétaire aux besoins de ses clients sur la seule base des prix de marché, et en ignorant les masses monétaires émises par ses concurrentes. Le concept de masse monétaire globale est alors inutile, sauf pour d’éventuelles statistiques.

Dans le cas des monnaies à étalon-or, l’État limite la liberté d’usage des autres devises, des autres monnaies, voire l’interdit. La croissance économique s’accompagne d’un besoin d’une plus grande quantité de monnaie. Du moins en valeur. Il existe en effet, un lien entre les marchandises à vendre et la quantité de monnaie disponible. Si la quantité des marchandises augmente, les besoins de monnaie augmentent. Et il en résulte une augmentation de la valeur de l’or. Ce qui induira une baisse progressive des prix. Ainsi, l’étalon-or conduit à envoyer un signal de baisse des prix. Les agents économiques devront alors bien interpréter ce signal, cette information. Ce n’est pas leur travail ou leur produits qui auraient une moindre valeur. C’est la valeur de la monnaie qui monte. Ce signal est erroné vis à la vis de la recherche de stabilité de la valeur d’une monnaie. Cette information, émise par les monnaies à étalon-or, envoie ainsi une information fausse aux marchés. Ce cas est l’inverse de l’inflation des prix.

Enfin, il y a le troisième cas d’une monnaie étatique utilisant un système de Banque Centrale sans étalon-or. Dans un tel cas, la Banque Centrale est aveugle aux besoins futurs en monnaie des marchés. Ainsi, elle peut tenter d’augmenter, à l’avance, de 3% par an cette masse monétaire en se fondant sur les augmentations passées de l’activité économique. Ou bien elle modifie le taux d’intérêt (taux directeur) afin de tenter de réduire ou d’augmenter, a posteriori, la masse monétaire émise. Ces mesures sont alors prises à contre-temps. Il en résulte souvent une inflation des prix. Un système de Banque Centrale est une invitation permanente faite à l’État de s’endetter davantage.

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contrat d’émission monétaire en freebanking

contrats d’émission monétaire en freebanking
En freebanking, chaque « unité de monnaie », ou « unité monétaire » est la valeur unitaire d’une monnaie. C’est la promesse commerciale d’une banque. Cette promesse est un « contrat unilatéral ». Un « contrat unilatéral » a deux contractant, le promettant et le bénéficiaire. Le bénéficiaire peut librement céder sa promesse à un nouveau bénéficiaire sans demander l’accord du promettant. Les clauses de ce contrat unilatéral sont stipulées dans le texte du « contrat d’émission monétaire », ou encore « contrat de monnaie ». La banque peut imaginer toutes sortes de contrats de monnaies. Chaque utilisateur choisit la monnaie qu’il préfère. Un banque pourra choisir ses clauses du contrat d’émission monétaire. Voici qq idées de clauses contractuelles:
– une « unité de monnaie » est représentée par un billet, un jeton, ou une écriture informatique.
– le droit du porteur de billet de banque, ou d’une unité de monnaie.
– Le contrat est unilatéral. Le bénéficiaire du contrat n’a aucune obligation envers la banque et peut céder librement son droit.
– désignation du tribunal compétent en cas de litige entre la banque et le porteur d’une « unité de monnaie »(billet ou autre).
– droit du bénéficiaire, le possesseur de l’unité de monnaie, le « holder ».
– délai de la banque pour exécuter sa promesse.
– recours du bénéficiaire dans le cas où la banque ne pourrait pas honorer sa promesse.
– procédure par laquelle les audits comptables informent les tiers des éventuels risques de la banque.
– procédure du retard de livraison d’or par la banque.
– procédure de liquidation de la banque.
– le bénéficiaire de la promesse peut librement céder cette promesse sans en informer le promettant(la banque). Le nouveau bénéficiaire en devient alors le nouveau propriétaire.
– l’utilisateur de cette monnaie connait et accepte le contrat d’émission monétaire publié par la banque.
– fiducie(ou société) afin que la banque ne soit pas propriétaire de l’or déposé à la banque.
– règles de limitation de l’émission monétaire.
– le bénéficiaire accepte de recevoir un or différent de l’or physique qui avait été initialement déposé.

ci-dessous deux exemples de contrats d’émission monétaire:

contrat de monnaie avec réserve de 100% or
Un certificat de dépôt est un billet de banque, est une promesse de la banque. Dans le contrat d’émission monétaire, la banque s’interdit d’émettre un nombre de billets, d’unités de monnaie, qui serait supérieur à l’or qu’elle détient dans ses coffres. Le bank run(ruée bancaire) est la demande simultanée des clients de la banque de recevoir l’or promis. En cas de ruée bancaire(bank run), la banque pourra honorer chacun des promesses, puisqu’elle a autant d’or que de billets émis.

contrat de monnaie avec réserves fractionnaires d’or
Une banque possède 100 grammes d’or et émet 101 billets. Chaque billet est une promesse de livrer un gramme d’or. C’est une banque à réserves fractionnaires car la quantité d’or détenu est inférieure aux promesses d’or de la banque. La banque pourra toujours livrer l’or correspondant aux 100 premiers billets. Mais, en cas de ruée bancaire, il lui manquera un gramme d’or pour honorer sa promesse du 101ème billet. Cette banque possède des actifs vendables. Elle en vend certains afin d’acheter ce 101ème gramme d’or sur le marché de l’or. Ce qui lui permet d’honorer sa promesse dans le délai prévu par le contrat de monnaie. En cas de retard, la banque aurait payé un taux d’intérêt de retard au possesseur du 101ème billet.

Si la banque manque d’actifs vendables, elle attend qu’un de ses emprunteurs la rembourse. Elle paye un intérêt de retard au possesseur du 101ème billet, comme convenu dans le contrat de monnaie. Puis, après un certaine attente, un emprunteur rembourse en or puisqu’il n’existe plus d’autres billets en circulation. Grâce à ce remboursement, la banque dispose d’or et honore la promesse du 101ème billet. Dans ce processus, la banque respecte son contrat d’émission monétaire.

une introduction au freebanking

une définition du freebanking
Le freebanking est une activité bancaire s’exerçant en marché libre sur une « zone économique ». Cette « zone économique » peut être une région, ou un pays. Mais une telle « zone économique » peut aussi être un ensemble de personnes sur Internet, ayant ou pouvant avoir, entre eux, des échanges commerciaux, ou non commerciaux. Le freebanking est une intervention, nulle ou faible, de l’État dans la création et l’usage de la monnaie.

le mot « freebanking »
Le freebanking s’écrit aussi « free banking » en deux mots. La traduction française est « banque libre ». En français, on parle aussi de « monnaie privée » pour signifier la monnaie produite par des banques en freebanking. Mais ce terme « monnaie privée » est ambigu, car il est aussi employé dans d’autres usages que le freebanking. Le terme « banque privée » ne traduit pas « freebanking ». En effet, en français, une banque privée est une banque ordinaire, mais qui s’occupe principalement de gestion de fortune.

Histoire du freebanking
Il y eut de nombreuses périodes de freebanking dans les pays riches. Le total des périodes de freebanking est de 600 ans. La période la plus longue fut une période de 130 ans en Écosse, de 1715 à 1845. Il y eu aussi du freebanking en France entre 1800 et 1804. Aucune de ces périodes de 600 ans de freebanking ne fut un freebanking pur et parfait. Il arrivait que l’État intervienne dans une loi, dans une autorisation, dans une restriction géographique. Des universitaires, économistes ou historiens, débattent de l’ampleur de ces interventions de l’État.

billet de banque, promesse de la banque
En freebanking, un billet de banque est la promesse d’une banque de livrer quelque chose. Pour une monnaie liée à l’or, ce quelque chose à livrer pourra être un gramme d’or. Il s’agit ici d’une « promesse valant contrat ». Il s’agit d’une « promesse commerciale ». Au lieu de parler de « billet de banque », on peut parler d’ « unité de monnaie », ou « unité monétaire ». Ce terme est plus général. Un compte bancaire d’un client de la BNP s’exprime en unités de monnaie.

promesse commerciale
Une promesse commerciale est identique à un « contrat unilatéral ». Le terme « contrat unilatéral » est le terme juridique exact, mais il est peu connu des non-juristes. Un contrat est toujours entre deux personnes. Un contrat unilatéral aussi. Une promesse commerciale, un contrat unilatéral, indique(stipule) toujours un promettant et un bénéficiaire. Le promettant a une obligation envers le bénéficiaire, mais le bénéficiaire n’a aucune obligation envers le promettant.

un peu de Droit du contrat
Un contrat unilatéral peut autoriser que le bénéficiaire ait le droit de substituer un nouveau bénéficiaire sans l’autorisation du promettant. En effet, l’obligation du promettant reste la même quelque soit l’identité du bénéficiaire. De plus, le contrat unilatéral peut aussi stipuler(indiquer) que le nouveau bénéficiaire n’a pas l’obligation de se faire connaitre du promettant. En freebanking, un billet de banque est une obligation contractuelle de la banque envers le porteur du billet. Quelque soit ce porteur de billet, l’obligation de la banque est la même. Il importe bien comprendre la différence entre contrat unilatéral et contrat bilatéral(synallagmatique). Pour transmettre un contrat bilatéral, l’intervention et l’accord des deux co-contractants est nécessaire. Une clause d’un contrat unilatéral peut permettre que le bénéficiaire transmette son droit librement. Le Droit du contrat existe indépendamment de tout État. Il est universel et de tous temps dans les pays civilisés.

certificat de dépôt
Prenons l’exemple d’une banque prêtant de l’or. L’or de la banque provient soit des investisseurs, soit des déposants. Le déposant remet son or au banquier et lui demande de restituer, non pas l’or déposé, mais de l’or en égale quantité. Le certificat de dépôt que lui remet la banque n’est donc pas un titre de propriété sur de l’or, puisque la banque lui rendre un or différent de l’or déposé. Le déposant autorise la banque à prêter son or. Le certificat de dépôt est une promesse de livraison d’or et non pas un titre de propriété qui serait directement sur de l’or. Le certificat de dépôt est ainsi une promesse commerciale, un contrat unilatéral. La banque est le promettant et le déposant est le bénéficiaire.

certificat de dépôt: promesse d’or ou titre de propriété sur de l’or?
Cette question a déjà été traitée brièvement au paragraphe précédent. Mais il faut enfoncer le clou. Certains confondent malheureusement « promesse d’or » et « titre de propriété sur de l’or ». Pire, ils s’autorisent à confondre les deux cas sous le prétexte qu’il n’y aurait aucune conséquence pratique. Ils commettent alors une deuxième erreur. Les conséquences pratiques existe et sont importantes. Leur confusion consiste en une erreur en Droit du contrat et une autre erreur dans la définition d’un droit de propriété sur une chose. Cette double erreur les entraîne dans des raisonnements fautifs en théorie monétaire. Un sac de dix pièces d’or est différent d’un autre sac de dix pièces d’or. En effet, un sac pourrait contenir une pièce usée ou fausse. Un sac pourrait être volé et pas l’autre. Il est absurde de confondre le droit de propriété qui s’attache à l’un et à l’autre. Donc ignorer la différence entre la propriété d’un sac d’or et la propriété de l’autre sac d’or est une faute en Droit. Le certificat de dépôt est donc une promesse de la banque, c’est un droit de propriété sur une promesse.

un prêt bancaire n’est pas un prêt
Je prête un livre à un ami. Puis il me le rend. C’est un prêt. L’emprunteur rend le même objet au prêteur. Dans un prêt bancaire, la banque reçoit une reconnaissance de dette de l’emprunteur. La banque devient propriétaire de cette reconnaissance de dette. Et l’emprunteur reçoit les billets de banque(ou les unités de monnaie). Pour faciliter le discours, restons dans l’exemple de la monnaie-or. Chaque unité de monnaie est une promesse de la banque. L’emprunteur devient seul propriétaire des billets de banque. Il les dépensera et rendra d’autres billets. Les billets de banque versés par la banque ne lui seront jamais restitués. Dans un prêt bancaire, ni la banque ni l’emprunteur ne possède un bien qui appartiendrait à l’autre. Le prêt bancaire n’est donc pas un prêt.

contrat d’émission monétaire
chaque billet de banque est, en lui-même, une promesse de la banque, c’est à dire un contrat unilatéral. La banque choisit chaque clause du contrat d’émission monétaire. L’or promis peut provenir des achats de la banque, ou de l’or apporté par les investisseurs de la banque, ou bien de l’or déposé par des déposants. Dans tous les cas, le billet émis par la banque correspond au même contrat passé entre la banque et le bénéficiaire, porteur du billet.

diverses sortes de monnaie
En freebanking, chacun peut créer sa banque, tenter de convaincre des utilisateurs de l’utilité de choisir sa monnaie plutôt que la monnaie du concurrent. La banque a une entière liberté de choix du contrat d’émission monétaire. C’est le marché qui décidera, c’est le client qui décidera. Chaque sorte de monnaie est définie par le contrat d’émission monétaire et par la banque qui l’émet. Deux monnaies émises par deux banques différentes, sont deux monnaies différentes.

activités bancaires en freebanking
Ce sera le thème d’un prochain article.

critiques contre le freebanking

Charles: l’introduction de monnaie métallique, ou le retour de l’étalon-or, n’empêchera aucunement l’inflation des prix (en or, cette fois!). cela a été le cas dans les années 1840-1860, lors de la découverte de gisements massifs d’or.
Une relecture de Hayek (« Denationalization of Money ») paraît fort utile…

Gidmoz: Le parti libertarien allemand propose le freebanking, la liberté de création monétaire. le freebanking s’oppose à tout système de banque Centrale, y compris une monnaie étatique à étalon-or. Le retour à l’étalon-or pour les monnaies étatiques serait une fausse bonne idée. Le freebanking permet d’augmenter les masses monétaires sans inflation des prix. C’est plus de crédit, et moindre cout. C’est donc plus de croissance et aucun risque systémique.

Charles: « Freebanking », ou « liberté de création monétaire »: ce sont sans doute des idées attendues depuis longtemps par tous les Madoff du monde, et autres faussaires. Les États bien sûr sont aussi des faussaires, mais ce serait naïf de croire que le freebanking n’attirera que des gens honnêtes. Lorsque la FED a été créée, après près d’un siècle de quasi-freebanking aux Etats-Unis, 40% des billets en circulation étaient des contrefaçons. J’approuve à 100% la plupart des thèses de Rothbard, mais le freebanking mérite mieux que de naïves illusions sur la nature humaine et les motivations des « freebankers ».

Gidmoz: Je ne partage pas votre inquiétude sur le risque d’escroquerie en freebanking. Chacun est libre de vendre des produits financiers les plus extravagants. Et pourtant, les escrocs sont une infime exception. Edmund Burke disait justement que la monnaie a de la valeur dans le commerce si l’État ne peut pas y toucher. C’est encore vrai. On a confiance dans les commerçants car ils redoublent de précaution pour éviter les risques de fraude dans leur entreprise. Et une seule fraude peut détruire la réputation, donc tout l’actif d’une entreprise. Le commerçant est honnête, très honnête, par égoïsme, comme dirait Adam Smith.

Charles: La naïveté n’aide pas le raisonnement libertarien. Je ne dis pas cela pour en refuser les principes (je suis membre de l’Institut Rothbard, quand même!) mais au contraire pour les rendre absolument logiques et inattaquables.
J’ai relu une énième fois « The Mystery of Banking » de Rothbard, dans lequel il expose sa théorie du freebanking. Pour tout banquier expérimenté, confronté à des multitudes d’environnements nationaux, les failles dans son exposé sont évidentes. Pour n’en citer qu’une seule: il fait un amalgame entre « liquidité » et « solvabilité ».
Si toutes les banques illiquides (mais solvables) devaient être fermées, et si l’on supprime le « prêteur en dernier ressort », il n’y aura plus de système financier, plus de moyens de paiement, plus de crédit, plus d’épargne.

Gidmoz: En freebanking, la liquidité est un bien qui est stipulé dans le contrat d’émission monétaire par la banque émettrice pour l’échanger contre la monnaie émise. Ce bien est coté sur un marché organisé. La banque ne peut émettre de la monnaie que si les actifs de la banque ont une vendabilité suffisante pour obtenir la liquidité prévue par le contrat de monnaie. Il n’y a alors nul besoin de banque centrale, ni de prêteur en dernier ressort.

Gidmoz: En freebanking, la liquidité est un bien qui est stipulé dans le contrat d’émission monétaire par la banque émettrice pour l’échanger contre la monnaie émise. Ce bien est coté sur un marché organisé. La banque ne peut émettre de la monnaie que si les actifs de la banque ont une vendabilité suffisante pour obtenir la liquidité prévue par le contrat de monnaie. Il n’y a alors nul besoin de banque centrale, ni de prêteur en dernier ressort.

Charles: La liquidité absolue n’existe que si les avoirs déposés sont conservés tels quels, et restitués à la première demande du déposant. Mais alors les banques ne sont que des coffres-forts, et n’accordent aucun crédit.
Au cours de ma carrière, j’ai analysé des milliers de bilans de banques. Je n’en ai jamais vu où les échéances du passif (en gros, les dépôts) correspondaient exactement à celles de l’actif (en gros, les crédits consentis). Pour la simple et bonne raison que la durée de l’épargne (courte) ne correspond jamais à la durée des crédits demandés (longue).
Je comprends donc que votre théorie transforme les banques en simples coffres (même pas sûrs, rien ne garantissant que le banquier ne se carapatera pas de nuit avec vos avoirs, or ou monnaie), les éliminent en tant qu’intermédiaires financiers dans les circuits de paiement, et abolit tout crédit.
Même Hayek admettait la nécessité d’un prêteur de dernier ressort, sans lequel, comme il l’écrivait, tout développement économique devient impossible, puisque ce développement implique précisément l’allongement des processus de production.

Gidmoz: Il existe un cas qui fait exception à ce que vous dites dans votre premier paragraphe. La banque peut vendre à des rentiers des créances sur certains de ses emprunteurs. Le rentier verse alors les liquidités pour acheter ces créances. Il préfère ainsi recevoir les intérêts et être remboursé à échéance des prêts bancaires.

Gidmoz: Il existe un deuxième cas qui fait exception à votre premier paragraphe sur la prétendue banque-coffre-fort. C’est la possibilité des réserves fractionnaires avec une clause acceptée de « surbooking ». Comme pour les places d’avion. Parfois, celui qui veut les liquidités promises attendra un peu. Celle clause de « surbooking » permet d’accorder des taux d’intérêt inférieurs, puisque moins de capital est immobilisé.

Charles: Encore faudrait-il que l’échéance des prêts corresponde exactement, au jour près, à la durée pour laquelle les « rentiers » souhaitent investir. C’est rarement le cas…

Charles: Quant au « surbooking », il arrivera nécessairement un jour où les demandes de retrait excéderont les encaisses de la banque, comme il arrive, dans les aéroports, que les passagers « surbookés » se retrouvent sur le carreau…

Gidmoz: Lorsque le rentier achète une créance, il accepte aussi l’échéance de remboursement. C’est le marché de la titrisation des créances sur les emprunteurs. Ce moyen constitue, à lui seul, une opportunité immense pour les banques en freebanking.

Gidmoz: je suis bien d’accord avec votre remarque sur le surbooking. C’est un risque que l’utilisateur de monnaie accepte. S’il refuse, il devra utiliser une autre monnaie plus chère. Le marché, les clients, trancheront entre « taux plus cher sans surbooking » et « taux moins cher avec surbooking ».

Charles: Une monnaie « low-cost », en somme?

Gidmoz: Il existe une troisième critique à votre banque-coffre-fort. C’est la production des biens liquides. En freebanking, toute commodity peut être la base de valeur d’une monnaie. La production physique de cette commodity augmentera suffisamment au-delà des besoins industriels habituels afin de servir une demande purement monétaire.

Gidmoz: Oui, votre terme « monnaie low-cost » est une bonne formule. Au pire, le commerçant ayant accepté cette monnaie hésitera à attendre « un peu » ou bien la revendra en payant une prime.

Charles: En d’autres termes, quand on dira « je vais déposer mon blé à la banque », ce sera vraiment un sac de blé (ou de l’oseille)?

Gidmoz: En freebanking, une monnaie est un titre financier ordinaire, c’est à dire une promesse de l’émetteur. Nul ne souhaite la livraison physique de la marchandise. Cette livraison physique est inutile.

Gidmoz: Il y a mille variantes à ma description de ce fonctionnement d’une monnaie en freebanking. Ainsi, une monnaie « low-cost » peut aussi choisir de rémunérer les utilisateurs qui ont du subir un retard à cause du surbooking. Le contrat de monnaie précise alors les conditions exactes de ce surbooking.

Charles: En somme des milliers, si ce ne sont des millions de monnaies, à échéances différentes, sans prêteur de dernier ressort, sans possibilité ni certitude de « réescompte ». Un nom approprié pour un tel système économique ne serait-il pas « capharnaüm » au lieu de « libertarien »?
Le système actuel a été dévoyé, par des États qui ne sont, comme l’écrivait Rothbard, que des « organisations criminelles ». Mais le « freebanking » est la porte ouverte à une multitude d’autres organisations criminelles, privées cette fois.

Gidmoz: Oui, en freebanking, il pourra exister de nombreuses monnaies. Si une banque trouve des clients qui lui font confiance, tous sont satisfaits. C’est le marché, c’est les clients qui choisiront s’ils préfèrent telle monnaie, ou telle type de monnaie, ou tel label de monnaie. Une multitude de petites banques très locales est probable. Des labels de qualité de certaines monnaies est tout aussi probable. Les marchés organisés pour échanger les titres d’une même denrée selon les échéances existent déjà. On vend un titre à telle échéance pour acheter le même titre à une échéance plus lointaine. Tout cela existe déjà.
Votre qualificatif de capharnaüm me conviendrait s’il décrit un marché animé. L’ordre d’un marché est rigoureux. Il est fondé sur les transactions de multiples vendeurs, chacun responsable de ses biens et de ses transactions. Pourtant, un observateur extérieur n’a pas et n’aura jamais toute l’intelligence de cet ordre du marché. Tout lui parait désordonné.

Charles: L’objectif n’est donc plus la « Société Ouverte » de Popper, ou la « Grande Société » de Hayek, dans lesquelles le commerce s’étend à des groupes de plus en plus grands, grâce à l’acceptation des mêmes règles. Le but devient des micro-sociétés, recroquevillées sur elles-mêmes, qui ne peuvent plus commercer (dans quelle monnaie?), autarciques, dans lesquelles seuls les « excédents de production » servent d’instruments d’épargne et d’échange, circonscrits à la communauté la plus restreinte.
Cela a existé: on l’a appelé le « Bas Moyen-Age ».

Gidmoz: Votre critique des micro-sociétés libertariennes est injuste. On peut commercer avec le monde entier en étant tout seul, en « micro-société » individuelle. Toute monnaie est échangeable sur internet à chaque instant. Le commerce peut se faire dans des monnaies différentes très facilement. La question du coût des transactions est un débat intéressant.